INDE - HIMACHAL PRADESH


La porte de l'Himachal Pradesh, après Delhi et l'Haryana c'est Shimla, "Queen of hills" comme on l'appelle. Elle fait partie des nombreuses stations climatiques, à proximité de Delhi, et donc hyper réputée et fréquentée pour leur fraîcheur. En cette période de l'année, la température à Delhi est de 45° et l'impression de suffoquer dans la capitale est accentuée par la circulation bruyante et l'épaisse pollution. À 300km de Delhi, il y a donc Shimla, à quelques 2000m d'altitude et où la température est tout simplement parfaite. Il y a du soleil, et on se croirait une journée de printemps en France ! 


Les villes de l'Himachal sont très colorées et entourées de forêts de pins qui verdissent toutes les collines alentour. C'est très joli et très différent de l'architecture des plaines. Dans le centre de Shimla la circulation est interdite et c'est un changement radical de marcher sans concert de klaxons et sans avoir à être attentif et éviter les motos et les tuk tuk ! 


La ville est construite à flancs de colline donc aucune rue n'est plate, soit un bon entraînement pour ce qui nous attend ! Car l'Himachal c'est la porte d'entrée vers l'Himalaya ! En hindi Himachal Pradesh signifie "pays des montagnes", bref finies les plaines, maintenant ça va piquer ! 

À Shimla, il y a une rue principale "The Mall" où tout ce qui peut se construire, se coudre ou se cuisiner se vend. On en profite pour faire quelques réserves supplémentaires d'habits chauds et même des gants de ski ! On est début mai, soit un tout petit peu tôt dans la saison pour aller rouler dans l'Himalaya. La saison touristique commence en juin, tout simplement car plus tôt les routes qui passent par des cols ne sont pas ouvertes car encore sous plusieurs mètres de neige ! Mais pour rejoindre le Spiti, nous on passe par le Kinnaur et la route (qui ne dépasse pas les 3000m d'altitude) n'est jamais fermée ! La plupart des touristes passent par le Lahaul pour rejoindre le Spiti et cette route ouvre début juin. Bref, on va presque être les seuls touristes mais il ne va pas faire chaud ! Et on sortira du Spiti par le Lahaul dès que la route sera ouverte. C'est la boucle du Kinnaur-Spiti-Lahaul, une des plus belles routes de l'Himalaya indien ! 


Après Shimla, le trafic de camions est très important. Il y a beaucoup de travaux dans le coin (construction de tunnels, carrières..) et visiblement Tata n'a pas encore pris la peine d'équiper ses camions de filtre à particules ! On monte donc dans les pots d'échappements, mais les routiers sont toujours hyper cools et s'écartent pour nous dépasser et nous laisser souffrir en paix dans les montées. 

Embouteillage de camions
Embouteillage de camions

On prend ensuite une route moins fréquentée et on retrouve le plaisir de rouler tranquilles dans la forêt, avec les singes pour compagnie. 

Dans les villes, les maisons sont très colorées, dans les villages on trouve les petites maisons de bois et de pierre, traditionnelles de l'Himachal et du Kinnaur. C'est très vert, assez sauvage et les forêts de pins et de conifères recouvrent les montagnes aussi loin que l'œil peut voir ! Le coin est très populaire auprès des indiens en lune de miel, venus souffler loin des villes et prendre un bon bol d'air à la chlorophylle. Par contre, les touristes occidentaux ne traînent pas trop ici, ils ne sont pas venus en Inde voir des forêts qui rappellent l'Autriche !

Les brochures touristiques indiennes appellent l'Himachal Pradesh le "pays des dieux"..  Le Gange sacré y prend sa source. Et selon la mythologie hindou, ces montagnes sont la demeure de Brahma, créateur du monde, et du couple Shiva Parvati. Bon, en fait les indiens appellent tous les états de l'Inde terre des dieux, et à raison car la ferveur religieuse est vraiment une caractéristique indienne.. En tout cas, il n'y a que dans l'Himachal qu'on s'est inquiété de savoir si nous avions bien pensé à emporter notre Bible dans nos sacoches ! 

Le Kinnaur est réputé en Inde pour ses fruits, et particulièrement pour les pommes. Les vergers sont partout et on a même bu du cidre (pas mauvais en plus !!) 

Par contre, la bouffe est moins variée que dans les plaines. On trouve des aloo parathas (galettes de blé très grasses fourrées au curry de pommes de terre), des chapatis, du dhal et du riz. Même perdus dans la forêt ou la montagne, on trouve toujours une petite dhaba de pierre ou de tôle ou un stand de street food ! Bref, c'est pas le Pamir, on ne risque pas de mourir de faim ! 

La route est facile, monte progressivement et il fait frais. Sur plusieurs portions la route est creusée dans la falaise et nous rappelle le Wakhan à la bordure du Tadjikistan et de l'Afghanistan, la route défoncée en moins ! 

La tenue des gens a changé depuis les plaines, les femmes ne portent plus le sari, mais un combo plus approprié à la fraîcheur : robe -polaire ! Hommes et femmes portent le chapeau kinnauri traditionnel, une toque marron et verte. Ici, quand on dit aux gens qu'on est partis du Kerala à vélo ils trouvent ça bien pour nous mais ne font pas vraiment de commentaires, par contre quand on leur dit qu'on va au bled d'à côté, là ils nous disent qu'on est vraiment complètement fous d'y aller à vélo parce que... "c'est trop loin"!! 

On se prend plusieurs orages dans le Kinnaur, qui ne nous rassurent pas car la région est très sujette aux glissements de terrain, avec pour conséquence des fermetures de route pendant plusieurs jours. Heureusement toutes les routes tiennent le coup, et le pire qui nous arrivera sera seulement de pousser les vélos dans la boue ! 

On croise beaucoup de travailleurs, à l'œuvre sur toutes les routes des montagnes. Dès le printemps, ils sont des milliers à travailler sur les routes de l'Himalaya. Ils viennent pour la plupart du Népal ou du Bihar, un état très pauvre de l'Inde. Ils travaillent, toutes générations confondues, des enfants aux vieillards et font des tâches très dures : casser des pierres à la masse, transporter des sacs des ciments... Ils travaillent dans des conditions très difficiles, dans le froid, le vent, en haute altitude, dans la poussière, brûlés par le soleil.. Nourris et logés sur place dans des abris de fortune, ils reçoivent un salaire misérable, vivent loin de leur famille, sont très mal considérés.. 


Et pourtant quand ils nous voient arriver, ils sont invariablement souriants, on rigole, on discute, ils nous invitent à partager le chai... Ces hommes et ces femmes forcent tout simplement le respect. On se demande si c'est la résilience qui leur fait accepter cette condition si rude ou le fait de n'avoir connu de la vie que de s'échiner à casser des pierres.. On ne peut pas admirer l'Himalaya, sans penser à eux !! 

À Reckong Peo, plus grande ville du Kinnaur, on passe un peu plus de temps que prévu.. bloqués par le froid et les orages ! On dort en doudoune et on mange même en doudoune ! On n'a pas compris, il fait 0° et même les restaurants laissent portes et fenêtres grandes ouvertes pour profiter du vent glacial ! Ils sont fous ces indiens... On n'a pas regretté d'avoir acheté des gants de ski ! 


À Reckong Peo, on doit aussi faire une demande de permis spécial pour emprunter la route qui va suivre, la Hindustan-Tibet Highway ! On ne va pas au Tibet, mais cette région est collée au Tibet, et certaines parties de la frontière ne sont pas bien définies. Il faut donc montrer patte blanche pour aller là bas et on n'a pas plus de 15 jours pour traverser la zone, même quand on objecte au préposé qu'à vélo dans les montagnes on n'est pas aussi rapides qu'à moto ! 

À côté de Reckong Peo, une quinzaine de lacets plus haut, il y a Kalpa, le premier village bouddhiste que l'on croise sur notre route dans l'Himachal hindou. Comme ça grimpe pas mal, on laisse nos sacoches à l'hôtel pour y monter ! Le village est tout petit, et est un parfait mix entre l'architecture de l'Himachal, avec ses petites maisons en bois, et la culture bouddhiste. Les drapeaux de prières flottent dans les rues, dans les forêts, face au monastère et face à l'impressionnante barrière himalayenne enneigée !


Ce matin là, le ciel est enfin découvert et on ne peut plus quitter des yeux les sommets enneigés qu'on découvre enfin ! L'Himalaya est face à nous : un petit coup de ventoline et on est prêts à en découdre avec le toit du monde ! 



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